- Coupable!

Résultat: 37 ans de taules. Zut.

* * *

- Mais c'est quoi, ce truc?

Ce truc? Juste lui. Entouré de quatre gardes. Mains menottées devant à la taille. Chaines à la taille. Chaines aux chevilles. Il avance à petites foulées. Tunique moche. Trois chaînes reliées aux trois gardes. Le dernier, derrière, fusil à pompe braqué sur le nouveau prisonnier. Un chien policier, muselière retirée à sa botte. Il essaye de se barrer, et y'a trois bodybuildés qui lui sautent dessus, un clebs enragé qui lui mord les roubignoles et il se prend du plomb dans le cul. Suffisant pour l'arrêter de sourire? Non. Il avance tranquillement. Sûr de lui. Mais il est pas content. Pas content de s'être fait pincé. Mais content d'avoir un nouvel environnement à tester. Des nouveaux gens avec qui il va pouvoir jouer. Finalement, la prison, c'est pas plus mal.

* * *

Une chaise clouée au sol, scellée même. Le couillon de garde derrière, toujours avec son toutou baveux. Un autre glandu devant, avec son calibre. Et une psy. Brune. Heureusement d'ailleurs. Elle aurait été rousse, il se serait tortillé pour lui sauter dessus. Il a une camisole de force. Il est saucissonné à la chaise. Il sourit bêtement à la dame. Elle tremble à moitié, même si elle cherche à le cacher. Il aime bien faire peur au gens. Elle prend un dossier. Elle farfouille dedans. Elle finit par trouver ce qu'elle cherche. Son nom, sur sa blouse: Jeanne Prion. Joli prénom, Jeanne. Jeanne, comme Jeanne d'Arc. Prion, comme... bah comme Jeanne d'Arc quand elle a dû être cramer. Il espère que ça ne va pas durer éternellement. Il a faim. Il a envie de pisser.

- Votre nom?
- Téo Vendredi, M'dame.
- Vous êtes là pour quoi?
- Viol.
- C'est tout?
- Meurtre.
- ...
- Quoi? Vous voulez toutes les charges?
- S'il vous plait, oui.
- *soupire* Tout est écrit dans votre machin, vous pouvez pas le lire vous-même.
- Monsieur Vendredi. Je suis là pour vous aider, pour vous montrer c...

Rire extraordinaire qui a fait sursauter le chien et crier la dame. Pour vous aider. Pour vous montrer le chemin de la rédemption. Hallelluya, ma soeur. Comme si. Il n'a pas envie de trouver le chemin. Il est bien comme il est. Ses pieds sont menottées aux barreaux de la chaise. Il a vraiment envie pipi maintenant. Il a soif aussi. C'est quand qu'on bouffe? Il veut une rousse. Il espère qu'il y a une garde rousse. Un jour, il trouvera un endroit sans caméra, sans personne. Et vas-y qu'elle y passera. Direct. Dans ses cris, il aura son plaisir. Dans sa douleur il sera content.

- Vous pensez à quoi?
- Hein?
- On ne dit pas hein, on dit comment.
- Comment?
- Vous pensez à quoi?
- Une pizza quatre fromage. Un vélo pour le fils du voisin. Le match de foot mardi. ET que j'ai oublié de rendre un dossier super important pour la banque.

* * *

- Madame Vendredi... Ecoutez-moi bien attentivement. Votre fils est un criminel. Un CRI-MI-NEL! On ne vous inculpe pas. On veut juste savoir où il est en ce moment. Nous sommes de la Police et qui dit être de la police, dit coincer les criminels. Je ne vous cache pas qu'on veut arrêter Téo. Mais si vous ne me dites pas où il est, on peut porter plainte contre vous: refus d'obtempérer, obstruction à la justice et deal de drogue.

Il sait que ça, ça va faire mouche. La petite dame lève les yeux rougis vers le grand bonhomme. Elle pleure à moitié, hoquète de temps en temps. Elle finit par se moucher, d'accord, elle va tout déblater, comme si elle était chez son psy, elle y va depuis 13 ans maintenant, alors, elle a l'habitude. Dans la pièce, y'a cinq policiers, ils ont tous fait pression sur elle. Y'a le grand dadet qui dit rien, dans son coin avec un calepin, y'a les deux maigrichons avec une voix nasillarde que si son fils était là, il les aurait enrhumé rien qu'en les regardant, y'a l'autre moche de chez Tati, habillé comme un as de pique et y'a le lion dans sa cage qui vient de parler. Elle pose son mouchoir sur la table et le fixe du regard. Une bombe aurait pu éclater, ils auraient pu se mettre à danser du french cancan qu'elle aurait continué, sans s'arrêter.

Elle raconte donc. Quand tout à commencer. Un jour, ils ont, c'est à dire, son mari, Aimé et elle, Alice, ils ont voulu un enfant. Mais Aimé était malade et ils ont pas pu en faire, sur le moment. Faut dire qu'il ne voulait pas trop, Aimé, parce que Aimé, son nom de famille, c'est Vendredi. Il a toujours fait attention à ça. Il voulait pas avoir un enfant qui s'appellerait Vendredi. Sa femme, il a toujours fait attention, elle a toujours son deuxième nom, celui de jeune fille qui suit le premier. Donc au final, ils ont décidé d'adopter. Ils ont contacté une agence et après deux mois de négociation, ils ont adopté Téo. Il vient de la Côte d'Ivoire. C'était pas long pour qu'ils viennent. Ils ont jamais su pourquoi. Peut-être que là-bas, ils en voulaient pas. Comment on peut ne pas vouloir un enfant, hein, monsieur l'agent? Hein? Oui, oui. Il était normal ce petit. On lui a donné des jouets, on l'a inscrit à l'école. Il était un peu turbulent, mais comme tous les enfants, hein? Vous avez des enfants, monsieur? Oui, oui, oui, c'est bon, pas la peine de pousser. Après l'école, bah y'a eu le collège, normal, il s'était fait un bon copain. Paul, Paul... Desmerles. Il habite pas loin de chez nous. Ils s'amusaient bien, mais au lycée, Paul est allé dans un privé, on avait pas trop d'argent, donc on a pas pu l'envoyer là-bas aussi. Je crois qu'il nous en a voulu pour cela. Au lycée, il a commencé à trainer avec la bande de filous. Je sais plus leurs noms, dites, je peux avoir un verre d'eau?

Un verre d'eau plus tard et la revoilà qui recommence. Au lycée, rien de bien méchant, comme tous les mômes, comme tout les petites teignes qui se prennent pour des caïds, mais c'est là qu'il a commencé à fumer. Pas que de la cigarette visiblement. Enfin, ça encore c'est pas très grave. Tous les mômes le font. Ou presque. Il a passé son BAC après avoir redoublé sa terminale, un bac S, lui et les chiffres, il aime bien. Il est partit à Brest même parce qu'ils habitent à côté en fait, un petit bled sans importance. A Brest il a suivi un diplôme comptabilité et il s'est fait embauché par une banque. Si les souvenirs de la petite dame était bon, son collègue, c'était Charlie Bauvrot et sa copine, c'était Lisa, mais elle ne se souvient pas de son nom de famille. C'était une piste à chercher ça. Un des maigrichons se lève et s'en va, surement pour aller débuter des recherches sur cette Lisa. Madame Vendredi se remet à pleurer. On ne pourra plus rien tirer d'elle maintenant... Tant pis, faut attendre. Les policiers se lèvent et quittent la pièce. Ils la laissent là avec son verre d'eau à peine entamé.

* * *

Hum, hum... Lisa Mancini, de son véritable identité: Elisabeta Manconini, d'origine italienne. Parents italiens. A fait ses classes à Brest, France. A travaillé pour l'agence Caisse d'Epargne de la Rue Voltaire. Domiciliée au 11, rue des Carmes, Brest en tant que locataire. N'a pas d'enfant, célibataire. Elle a été retrouvé morte, les tripes en éventail, pardonnez-moi l'expression, hum, hum, le ventre ouvert et l'intestin retiré. Intestin que l'on a retrouver dans un sac en plastique juste à côté, ou du moins ce qu'il en reste. Elle a été vue la dernière fois au Bistrot du Cap en compagnie d'un homme de taille moyenne, environ 1m80, de corpulence athlétique, le crane rasée, la peau noire, des tatouages sur le bras, d'origine africaine. Il portait un jean délavé, un t-shirt sans manche et des rangers au pied. Dans sa main, il y avait des clés de voiture, il jouait avec quand il est entré pour parler à Mademoiselle Mancini. L'avis de recherche a été lancé le 12 dans la matinée quand Monsieur Mancini n'a pas vu sa fille arriver pour l'aider, il a appelé, rien du tout, donc il a téléphoné a la police. Avis de recherche, blablabla... blablabla... Ah, le 27, on retrouve son corps enterré dans un champs, dans le village de ses parents. Elle avait des traces de suie sur les doigts et les genoux, signe qu'elle avait surement été enfermée dans une cave ou pas loin d'un poêle traditionnel. Des traces ont montré qu'elle avait été violée alors qu'elle était encore en vie. Elle a eut les yeux crevés pendant qu'elle était encore en vie. La chose a été réalisée avec un objet indéterminé, contondant probablement.

Le légiste venait de tout dire. Foutu Vendredi. Il allait le pincer pour des siècles avec tout ça. Mais si seulement Mancini avait été la seule. Il tourna la tête vers les autres dossier. Lennie Peters, une américaine en voyage-camping à Saint-Malo, Lola Poulevellen retrouvée à Morlaix, Laurence Girodet, pareil, à Morlaix et Léonore Louis, à Quimper. Quatre jeunes femmes retrouvées assassinées, enterrées, l'intestin à côté, violées, les yeux crevés. Foutu Vendredi, il allait lui faire payer ses crimes!

* * *

- Faîtes gaffe avec ce monstre. Il est cinglé! Il a bousillé une porte chez nous. T'aurais vu le bois, il en a fait des bâtonnets de mikado. Ses biscotos, c'est pas de la nioniotte. Moi, je serais toi, j'le collerais en isolement. Il est complètement marteau. Il a un monde à lui. Ah, c'est sur, il peut sourire comme ça, faire le bon chienchien, mais t'as le malheur de tourner le regard à côté, il te saute dessus et te bouffe tout cru. Y'a un collègue qu'est allé à l'hosto, il lui a bouffé l'oreille, toute sectionnée, de là à là! Fais gaffe aux co-détenus, il serait capable de les zigouiller. Je sais pas, mais il a dû craquer dans son ciboulot, parce qu'il parait qu'avant, c'était un bon gars. Je sais pas ce qu'il s'est passé, mais il a tué quatre ou cinq bonnes femmes. A mon avis, il a une araignée au plafond, c'est pas possible autrement.